Depuis sa maison parisienne, située à des milliers de kilomètres de son pays natal, le politicien syrien âgé de 84 ans a abordé lors d’un entretien téléphonique avec le magazine américain « Newsweek Middle East » l’intervention iranienne en Syrie, le coup d’État raté en Turquie, les élections présidentielles américaines, l’arsenal chimique syrien, et le récent ciblage « mystérieux » par les États-Unis des forces armées syriennes à Deir ez-Zor au lieu des groupes terroristes. Il a souligné qu’il n’avait aucune intention de jouer un rôle politique dans l’après-Assad, mais rêve de retourner dans son pays.
Au cours de la conversation, Khaddam a décrit la guerre dans son pays depuis 2011 comme un conflit mondial, notant que la communauté internationale et les pays arabes ont manqué plusieurs occasions d’aider la révolution, qui n’a pas atteint son objectif principal de renverser le président syrien Bachar al-Assad dans « des semaines ou quelques mois ».
Dans ce contexte, il a attribué la responsabilité de l’hostilité russo-américaine et des conflits mondiaux sur l’utilisation de la force dans le pays pour attiser ce conflit, considérant que Washington traite l’opposition de manière « incompréhensible », après l’avoir trahie, refusé une assistance militaire et permis à la Russie de retirer le tapis de sous les pieds de la Syrie.
Concernant les relations américano-turques, Khaddam a estimé que Washington avait également trahi son allié dans la région. Il a soutenu que les États-Unis ont contribué au coup d’État raté le 15 juillet de l’année dernière et ont armé les Kurdes contre la Turquie. Il a expliqué que Moscou s’est réconcilié avec Washington et a fourni des informations à ce sujet il y a quelques jours après des tensions entre eux suite à la destruction d’un avion Su-24 en novembre de l’année dernière.
À la lumière de la tenue de l’ONU responsable du régime syrien pour deux attaques chimiques, l’une en 2017 et l’autre en 2016, Khaddam a nié toute connaissance de l’arsenal chimique de la Syrie, à la fois en général et en détail. Il a affirmé que cette question relève de la compétence des services de renseignement et de l’armée. Tout en discutant de la concentration de Washington et de Moscou sur cet arsenal au début des événements, Khaddam a confirmé que ces circonstances ont permis à Assad de tuer avec d’autres armes. Il a critiqué l’acceptation par certains responsables américains de l’idée de son maintien au pouvoir pour un second mandat.
En ce qui concerne l’intervention des États-Unis en Syrie, Khaddam a décrit le ciblage mystérieux des positions de l’armée syrienne à Deir ez-Zor comme une « erreur », justifiant que les États-Unis sont au courant des emplacements tant du régime que des groupes terroristes.
Sur le plan politique, Khaddam a affirmé que le président américain Barack Obama l’a déçu après son arrivée au pouvoir, surtout après s’être réconcilié avec l' »Iran », malgré son intervention en Syrie, en Irak, au Liban et au Yémen. Il a exprimé son espoir de voir arriver la candidate du Parti démocrate, Hillary Clinton, après Obama.
Concernant l’État islamique (ISIS), Khaddam estimait que diverses circonstances ont conduit à son émergence et à sa propagation en Syrie. Il a confirmé qu’Iran a nourri l’organisation dans le cadre de ses efforts pour créer une force sunnite contre les sunnites de la région.
Dans ce contexte, il a souligné la différence significative entre le père et le fils Assad dans leur relation avec l’Iran. Alors que ce dernier a permis à Téhéran, qui se considère maintenant comme un protecteur à Damas, d’intervenir dans les affaires syriennes par le biais de la Garde révolutionnaire iranienne et du « Hezbollah » et d’autres groupes de soutien, Téhéran craignait le père Assad et hésitait à intervenir auprès de lui.
En lien avec cela, Khaddam a lié la présence du « Hezbollah » et la présence du régime en Syrie, affirmant que ce dernier ne pourrait pas se maintenir seul si l’Iran, sa principale source de financement en Syrie, était coupé. Il a souligné que le « Hezbollah » n’est rien sans le régime syrien actuel.
En conclusion, Khaddam a affirmé que la crise syrienne ne prendrait fin que si tous les acteurs se rassemblaient autour d’une table. Cela pourrait être réalisé en organisant une conférence internationale pour sauver la Syrie, avec la participation de toutes les puissances mondiales, de l’Occident à l’Orient, y compris l’Iran avec sa « direction actuelle modérée ». Il a soutenu la libération de la Syrie et la formation d’une force armée internationale pour retirer les armes de toutes les factions.
D’autre part, Khaddam a rejeté toute solution politique, mettant en garde contre la possibilité pour le régime ou ses figures de rester au pouvoir, ce qui pourrait entraîner de nouveaux conflits dans le futur, pouvant s’étendre à d’autres parties de la région et du monde. Il a nié chercher une position politique en Syrie après Assad, décrivant son rôle comme patriotique.