M. KHADDAM (République arabe syrienne) :
Monsieur le Président, c’est avec un grand plaisir que je vous présente, de ma part et au nom de la délégation de la République arabe syrienne, nos chaleureuses félicitations pour votre élection à la présidence de la vingt-huitième session de l’Assemblée générale des Nations Unies. Votre sélection pour cette haute fonction est une véritable expression de l’appréciation et de l’estime dans lesquelles la communauté internationale tient votre pays et votre peuple.
Je suis heureux d’accueillir les nouveaux membres, la République démocratique d’Allemagne, la République fédérale d’Allemagne et les Bahamas. Avec leur entrée aux Nations Unies, le principe d’universalité essentiel à l’Organisation mondiale, que nous avons activement soutenu depuis la création des Nations Unies et pour lequel nous avons constamment œuvré à atteindre, a été grandement renforcé. À cet égard, nous formulons l’espoir que l’affiliation de la République fédérale d’Allemagne à l’Organisation ouvrira la voie à une meilleure compréhension de sa part des problèmes du tiers-monde, et en particulier de ceux du Moyen-Orient.
La convocation de la vingt-huitième session de l’Assemblée générale des Nations Unies intervient à la suite d’un événement qui a suscité un intérêt mondial : la Quatrième Conférence des chefs d’État ou de gouvernement des pays non alignés tenue à Alger du 5 au 9 septembre 1973, le plus grand sommet que la société humaine ait connu au cours de la dernière décennie.
Les déclarations et résolutions de cette Conférence [voir A/9330] incarnent l’impulsion des nations non alignées vers l’accomplissement de soi et l’affirmation de leur identité, ainsi que la réaffirmation des principes de non-alignement, prouvés être des principes universels visant à réaliser la justice, l’égalité, la coexistence et la paix entre les nations.
La signification fondamentale de cette Conférence réside dans le fait qu’elle incarne la détermination de plus de la moitié de la population mondiale à se libérer des relations inégales, à établir à la place entre les nations une relation démocratique tant sur le plan politique qu’économique, à éradiquer le colonialisme sous toutes ses formes et à éliminer l’hégémonie, l’occupation étrangère, le sous-développement et la privation.
Si le mouvement de non-alignement a été décrit par le passé comme une expression de la conscience mondiale, la Quatrième Conférence a révélé que ce mouvement avance avec fermeté vers la réalisation de la liberté dans le monde. Cette Conférence, avec la clarté de vision qui caractérisait ses travaux, a su s’adapter aux changements internationaux, affirmant et développant leurs aspects positifs sans dévier des principes sur lesquels repose le mouvement de non-alignement.
La Conférence d’Alger était une réunion qui avait une vision globale, lors de laquelle il a été de nouveau promis de réaliser les objectifs fondamentaux du mouvement de non-alignement – ces objectifs universels concevant la paix mondiale comme une unité indivisible, centrée sur l’élimination des tensions partout, l’augmentation de la coopération internationale, le développement des capacités innées des pays en développement, mettant fin à la privation, au sous-développement et aux relations inégales entre les peuples.
Nous espérons que l’Assemblée générale des Nations unies soutiendra les principales demandes formulées dans les déclarations et résolutions de la Conférence d’Alger, car elles sont toutes parfaitement compatibles avec la Charte des Nations unies.
La relation entre la Conférence des pays non alignés et les Nations unies découle non seulement du fait que les pays non alignés représentent la moitié de l’adhésion à l’Organisation internationale, mais aussi de la détermination des pays non alignés à renforcer le rôle des Nations unies et, dans ce cadre, à assumer la tâche de réaliser ses objectifs et les objectifs de la Charte de manière à bénéficier à toute l’humanité.
Dans notre examen de la situation internationale, un accent particulier doit bien sûr être mis sur les nouveaux développements qui ont eu un impact important sur les relations internationales. Visant à éliminer les dangers de confrontation entre les deux grandes puissances et à atténuer les tensions en Europe, ces développements resteront néanmoins d’effet limité et de résultats incertains tant que leurs bénéfices ne s’étendront pas à toutes les régions du monde, éradiquant les conditions oppressives encore prévalentes dans le tiers monde, telles que le colonialisme, l’exploitation, le racisme, l’occupation et l’agression aux mains de l’impérialisme et du contrôle étranger.
La concorde internationale restera une fiction élaborée si cela signifie le monopole des grandes décisions régissant notre destin entre les mains de quelques-uns et la consolidation de conditions injustes auxquelles les peuples du monde en développement sont soumis, ou si elle doit être réalisée au détriment des peuples et de leurs droits à la liberté, au progrès et à l’autodétermination.
Dans ces circonstances, la détente reviendrait à éteindre les foyers de conflit dans une certaine région du monde tout en alimentant les éléments de conflit dans d’autres régions.
Dans ce contexte, il est décevant de voir les États-Unis d’Amérique s’efforcer d’exploiter le climat international de détente afin de consolider leurs intérêts au détriment des intérêts d’autres peuples et de soutenir l’agression dans toutes les régions du tiers monde, en particulier au Moyen-Orient.
L’état actuel de la sécurité internationale ne permet pas à la majorité des nations de réaliser leurs aspirations à la liberté, à l’indépendance, à la paix et au progrès. L’agression impérialiste se poursuit dans des régions importantes de l’Asie, de l’Afrique et de l’Amérique latine.
Fidèle à son soutien aux principes de la liberté des peuples et de leur droit à l’autodétermination sans ingérence étrangère, ainsi qu’à leur droit à l’intégrité territoriale, à l’unité régionale et à la souveraineté permanente sur les ressources naturelles ; fidèle dans sa lutte contre le colonialisme, le contrôle impérialiste et l’exploitation, contre la discrimination fondée sur la couleur, la race ou la croyance ; fidèle à la Charte des Nations unies, la République arabe syrienne exige la cessation de l’ingérence et de l’agression impérialistes contre le peuple cambodgien et considère que les cinq points du Gouvernement de l’Union nationale sont une base pratique et juste pour la résolution du problème cambodgien.
Nous demandons en outre la résolution du problème de la Corée par la création de conditions appropriées pour hâter l’union de la Corée en tant que nation indépendante et pacifique.
Nous exigeons le retrait de toutes les forces étrangères des territoires méridionaux de la Corée et la dissolution de la prétendue Commission des Nations unies pour l’unification et la réhabilitation de la Corée. Nous croyons que cette session de l’Assemblée générale des Nations unies devrait œuvrer à unir, et non à consacrer, la division de la Corée.
Nous saluons l’Accord sur le rétablissement de la paix au Viêt Nam. Nous croyons que la préservation de la paix dans cette région est absolument nécessaire pour la mise en œuvre de bonne foi de toutes les clauses de cet Accord. Nous déplorons donc les violations répétées des dispositions de l’Accord de la part des impérialistes et de leurs agents, et nous espérons que les courageux Vietnamiens obtiendront un succès complet dans leur lutte pour rétablir la structure sociale et économique de leur pays. Nous soutenons vivement la lutte des mouvements de libération nationale en Afrique, en Amérique et en Asie. Nous condamnons vivement le rôle de la minorité raciste en Rhodésie et en Afrique du Sud ainsi que les manœuvres impérialistes visant à renverser les gouvernements nationaux dans ces pays.
Nous saluons chaleureusement la lutte des mouvements de libération nationale armés dans les quatre coins de l’Afrique contre les forces de la discrimination raciale et de l’exploitation colonialiste, et nous leur offrons notre soutien et nos encouragements. Nous leur souhaitons de réaliser rapidement leurs objectifs.
À cet égard, permettez-moi de saluer l’accession à l’indépendance de ce vaillant pays qu’est la Guinée-Bissau grâce à la lutte de ses fils, assistés par le grand continent africain et les peuples épris de justice.
Il est grand temps que le régime portugais révise sa politique réactionnaire et accorde le droit à l’autodétermination et à l’indépendance du Mozambique et de l’Angola. L’admission de la Guinée-Bissau, bientôt nous l’espérons, au sein de l’Organisation sera un jalon dans la lutte universelle pour la liberté et la justice.
L’opinion mondiale reconnaît que le problème du Moyen-Orient pose désormais la plus grande menace pour la paix et la sécurité internationales. C’est le seul problème qui porte en lui les germes d’une guerre mondiale.
Les origines de la question, ses tragédies et ses dimensions sont connues de tous. Ses traces laides sautent aux yeux avec l’occupation israélienne de la terre de Palestine en 1948, qui a déraciné ses habitants et les a privés de tous leurs droits nationaux et humains. Ces traces laides se sont encore manifestées avec l’occupation israélienne étendue de juin 1967, qui était une extension du colonialisme de peuplement et d’un complot impérialiste contre la nation arabe.
Plus de six ans se sont écoulés depuis l’occupation israélienne des territoires de trois pays arabes membres des Nations unies, et les forces impérialistes s’efforcent toujours de consolider cette occupation en consacrant ce fait accompli agressif. Le soutien illimité offert par les États-Unis d’Amérique à l’agresseur israélien a permis à Israël de défier le monde entier et de ridiculiser les Nations unies, ses résolutions et sa Charte.
Mais les nations amantes de la paix ont pris conscience des dangers inhérents à la poursuite de cette situation menaçante, avec pour résultat que l’impérialisme américain et sa créature sioniste sont maintenant alignés d’un côté face à toutes les autres nations de l’autre.
L’isolement d’Israël et de l’impérialisme américain aux Nations unies et ailleurs dans la sphère internationale est devenu l’une des caractéristiques distinctives de l’ère actuelle dans les relations internationales. Il reflète l’attitude de rejet que la communauté internationale adopte contre l’agression et les protecteurs de l’agression.
Nous soumettons à nouveau devant cette Organisation internationale le cas de l’agression israélienne car nous sommes convaincus que les Nations unies, malgré ses lacunes, sont capables de jouer un rôle utile dans la lutte contre l’impérialisme, et dans l’élimination des conséquences de l’agression et la protection de la paix mondiale.
Dans un monde d’intérêts si étroitement liés, un monde de destin commun, aucun gouvernement responsable ne peut rester indifférent lorsque son territoire et la paix de son peuple sont menacés de destruction.
La crise au Moyen-Orient ne menace pas seulement la paix et la sécurité internationales ; elle constitue également une menace pour la sécurité économique des nations. En plus de cette région étant la route de communication la plus importante par voie terrestre, maritime et aérienne entre trois continents, elle possède les plus grandes réserves connues de pétrole au monde, le pétrole constituant le principal pilier de la vie en ce qui concerne tout progrès de la civilisation au cours de notre ère.
Les signes et les statistiques indiquent que la roue de la vie dans ce monde, et particulièrement dans les nations industrielles avancées, sera pendant longtemps et de plus en plus dépendante des sources d’énergie au Moyen-Orient. En conséquence, une vision de la crise au Moyen-Orient sous cet angle devrait inciter les nations à intensifier leurs efforts pour éliminer les foyers d’explosion dans la région et mettre fin au jeu imprudent de Sion avec les destinées de ses peuples. Les hommes partout ont commencé à comprendre que leur richesse nationale est l’un des éléments de leur force inhérente et doit jouer un rôle dans la protection de leur indépendance et de l’intégrité de leurs terres.
Par conséquent, la situation au Moyen-Orient exige un traitement rapide et efficace de la part des Nations unies et de ses membres. Il faut déployer tous les efforts possibles pour empêcher l’agresseur israélien de récolter les fruits de son agression. Le fait de tolérer l’agression en permettant au fait accompli de prospérer menace une érosion continue du prestige des Nations unies et encourage l’agression et l’expansion partout sur terre.
Il a été démontré ces dernières années qu’Israël, prospérant à travers l’illégalité et adoptant la violence, la terreur, la guerre et l’occupation pour servir les objectifs de son colonialisme de peuplement, ne tient aucun compte des résolutions des Nations unies, n’a aucun respect pour le droit international, humain ou moral. Les dirigeants israéliens sont allés jusqu’à considérer les résolutions prises par les Nations unies comme un signe de la faillite de l’Organisation, moralement, politiquement et légalement.
Cette arrogance israélienne et ce mépris du droit international et des coutumes ont conduit Israël à entreprendre des pratiques hideuses qui suscitent l’aversion et la condamnation du monde entier. Le 8 janvier 1973, des avions israéliens ont lancé une attaque brutale contre des cibles civiles en République arabe syrienne, entraînant le massacre de centaines de civils, personnes âgées, femmes et enfants. Le 21 février 1973, les forces israéliennes ont attaqué les camps de réfugiés d’Al Baddawi et d’Al Barid dans le nord du Liban, tuant un grand nombre de femmes, de personnes âgées et d’enfants. Le 22 février de cette année, des avions blindés israéliens ont abattu un avion civil libyen qui avait perdu son chemin au-dessus du Sinaï, entraînant la mort de 108 passagers innocents. Pendant la nuit du 9 au 10 avril 1973, des forces de commando israéliennes ont attaqué la ville de Beyrouth. Ils ont assassiné trois dirigeants palestiniens dans leurs quartiers de sommeil et ont tué un certain nombre de réfugiés palestiniens et de civils libanais. C’était une véritable opération de mafia, mais elle a été perpétrée non pas par des gangs hors-la-loi, mais par les autorités d’un État membre des Nations unies.
Pendant cette période, Israël a commis une série de meurtres délibérés de citoyens arabes à Paris et à Rome sous prétexte qu’ils soutenaient la cause palestinienne ou qu’ils étaient suspects de soutenir cette cause. Je pense que nous nous souvenons tous du meurtre du citoyen marocain Bouchiki à Oslo par le personnel du renseignement israélien et de l’expulsion qui a suivi d’un des membres de la mission israélienne en Norvège.
Le 5 août 1973, des avions blindés israéliens ont enlevé un avion civil irakien survolant le ciel de Beyrouth pour l’aéroport de Lydda, mettant en danger la vie de 76 passagers et violant gravement la souveraineté libanaise et la sécurité de l’aviation civile internationale. Dans sa résolution 337 (1973), le Conseil de sécurité a condamné cette agression, tout comme l’Organisation de l’aviation civile internationale.
Le 13 septembre 1973, 64 avions de guerre israéliens de fabrication américaine ont entrepris l’opération la plus sérieuse de violation de l’espace aérien syrien en tentant de frapper des cibles civiles. Ils n’ont été empêchés d’atteindre leur objectif que par l’opposition de nos avions de combat. Il est très ironique que les dirigeants d’Israël prétendent que leurs avions effectuaient une patrouille de routine lorsque nos avions les ont attaqués.
L’arrogance israélienne va jusqu’à considérer que des avions de chasse israéliens survolant à une profondeur de cent kilomètres dans le ciel syrien ne font que voler en routine. Les autorités israéliennes ont élevé la terreur au niveau de la politique officielle de l’État, en vertu du principe que la fin justifie les moyens, sans égard au droit international et sans respect pour la souveraineté des autres nations. Il est curieux que ce comportement d’Israël, où il s’arroge le droit de violer la souveraineté des nations, n’ait pas incité les États étrangers qui en ont souffert à prendre des contre-mesures efficaces. Par conséquent, nous voyons Golda Meir et Dayan annoncer sans trembler qu’Israël continuera sur sa voie, quelles que soient les conséquences.
Nous devons nous demander ce que l’Organisation des Nations unies doit faire face à cette situation, qui constitue un défi grave pour l’Organisation internationale et pour la communauté internationale et humaine dans son ensemble.
Les États-Unis ont entravé la compétence du Conseil de sécurité en abusant du droit de veto, qu’ils ont exercé pour encourager l’agression israélienne et la consolidation de l’occupation israélienne des terres arabes, en renforçant les intérêts impérialistes américains au Moyen-Orient. Il était naturel que ce comportement de la part des États-Unis conduise au phénomène de déplacement du centre de gravité des activités et de l’efficacité des Nations unies du Conseil de sécurité à l’Assemblée générale.
L’Assemblée générale doit donc assumer ses responsabilités en vertu de la Charte. Elle doit formuler des recommandations pratiques spécifiques face à une situation qui menace la paix et la sécurité internationales.
La situation au Moyen-Orient, menaçant la paix et la sécurité de chaque nation, exige de l’Assemblée générale qu’elle adopte des résolutions qui exerceront une véritable pression de contrainte sur Israël, conformément aux dispositions du chapitre VII de la Charte de l’Organisation.
Le passage de six ans depuis l’agression israélienne et l’occupation des territoires de trois nations arabes est une indication claire que les dirigeants d’Israël ne sont pas influencés d’un iota par les conseils et recommandations jusqu’ici formulés dans les résolutions de l’Assemblée générale, et qu’il n’y a pas d’autre alternative que de donner à de telles résolutions un nouveau contenu.
L’Organisation de l’unité africaine (OUA) a parfaitement compris ce fait et a agi en conséquence lorsqu’en mai 1973, elle a adopté une résolution déclarant que l’attitude d’Israël pourrait amener les États membres de l’OUA à prendre, au niveau africain, individuellement ou collectivement, des mesures politiques et économiques contre lui, conformément aux principes contenus dans les chartes de l’OUA et des Nations unies.
De plus, la quatrième Conférence des nations non alignées, tenue à Alger en septembre 1973, a appelé les États membres à prendre des mesures pour boycotter Israël sur le plan diplomatique, économique, militaire et culturel, ainsi que dans le domaine du transport maritime et aérien.
Je tiens à saluer dans ce contexte la démarche dynamique et progressiste proclamée lors de la 2140e réunion par le président de la République du Zaïre, le général Mobutu Sese Seko Kuku Ngbendu Wa Za Banga, devant l’Assemblée et le monde entier. C’est là l’expression la plus authentique du profond respect des principes de la Charte de notre Organisation. C’est une affirmation de l’engagement de nos peuples à soutenir la lutte pour la liberté, la justice et l’autodétermination, et à agir ensemble dans la solidarité et la détermination contre l’injustice.
Nous saluons l’esprit de courage et de justice manifesté par tous les États qui, percevant la nature expansionniste et agressive d’Israël, ont rompu leurs relations avec lui. Nous appelons l’Assemblée générale à adopter une résolution comportant des dispositions contraignantes qui inciteront Israël à mettre fin à son agression, conformément aux dispositions de la Charte. Nous rappelons à cet égard à l’Assemblée générale qu’Israël est le seul membre à avoir été accepté conditionnellement aux Nations unies. La résolution 273 (III) de l’Assemblée générale de mai 1949 rappelle en outre les deux résolutions concernant la Palestine et le rapatriement des réfugiés palestiniens [résolutions 181 (II) et 194 (III)]. Israël a continué à violer ces résolutions depuis le jour de son entrée dans l’Organisation jusqu’à ce jour même.
Avec cette position, Israël s’est placé en dehors du cercle des membres des Nations unies d’un point de vue légal, et il ne fait aucun doute que ses violations répétées de la Charte de l’Organisation rendent d’autant plus justifiable le fait qu’Israël soit privé de son appartenance à celle-ci. Nous nous demandons comment l’Organisation peut protéger son existence du sort rencontré par la Société des Nations si elle ne chasse pas de ses rangs tout membre qui désobéit à sa constitution, qui piétine son prestige, et qui annonce, avec la langue d’une autorité responsable, que moralement, politiquement et légalement, c’est une organisation en faillite.
Nous en appelons à l’Assemblée générale, en défense du prestige de l’Organisation internationale et de son existence même et par respect pour les principes de droiture et de justice, d’approuver une résolution privant Israël de son adhésion et le boycottant diplomatiquement, économiquement, militairement, culturellement et dans les communications maritimes, aériennes et terrestres ; exigeant le retrait immédiat et inconditionnel des forces israéliennes de tous les territoires arabes occupés depuis juin 1967, et que toutes les mesures prises par Israël dans ces territoires pour en altérer les caractéristiques démographiques et géographiques soient considérées comme nulles, avec non-reconnaissance des conséquences de ces mesures ; en outre, qu’elle reconnaisse le droit du peuple arabe palestinien au rétablissement de tous ses droits nationaux dans sa patrie.
Les autorités de Tel Aviv tentent d’attirer l’opinion publique mondiale en promouvant l’idée de reconnaissance et de frontières sécurisées. Cependant, le monde a vu la fausseté de la position israélienne lorsque Israël a annoncé qu’il n’accepterait pas le retrait du plateau du Golan, de la bande de Gaza, de la vieille ville de Jérusalem, de Charm el-Cheikh ou des zones du Sinaï, derrière une ligne tracée de Charm el-Cheikh à Rafah ; que la Cisjordanie, bien que devant être en grande partie rétablie sous la souveraineté du Royaume de Jordanie selon le plan israélien, devrait rester ouverte aux citoyens d’Israël, qui devraient avoir le droit de posséder des terres et d’y travailler, et qu’Israël conserverait un certain nombre de sites militaires le long du fleuve Jourdain.
Israël considère tous ces éléments comme des prémisses sine qua non sur lesquelles toute négociation doit commencer, bien qu’il ne les considère pas comme des conditions préalables. Le simple fait de l’occupation israélienne continue pendant une période de plus de six ans constitue en soi une condition qui pèse lourdement sur nous, et à l’ombre de laquelle des négociations équitables entre l’occupant et la victime de l’occupation ne peuvent avoir lieu. Toute négociation dans de telles circonstances ne peut conduire qu’à la soumission et à l’acceptation des termes de l’occupant. C’est ce qu’Israël et les forces derrière elle désirent et travaillent réellement à atteindre.
Quant à l’idée de « frontières sécurisées », comme Israël les appelle, il s’agit d’une simple ruse. Israël méprise l’intelligence de nous tous lorsqu’il justifie sa cupidité expansionniste en la qualifiant d’effort pour obtenir des frontières sécurisées. De nos jours, existe-t-il vraiment quelque chose comme des frontières géographiques sécurisées ?
Les progrès technologiques et les nouvelles avancées dans les armes, dont Israël possède les types les plus avancés, ont effacé les frontières, et il n’y a plus de barrières géographiques significatives sur terre ou sur l’eau face à ces armes. Il n’y a donc pas une seule nation dans le monde qui puisse revendiquer pour elle-même des frontières géographiques sécurisées.
La véritable sécurité est celle qui est construite sur la justice, sur la remédiation de tout sentiment d’injustice éprouvé par les pays voisins, sur le respect du droit et le respect des principes de la Charte. Ce genre de sécurité est naturellement incompatible avec les objectifs expansionnistes d’Israël. Les « frontières sécurisées » que tente de promouvoir Israël pour elle-même sont des frontières élargies et mobiles qu’elle découpe en altérant les caractéristiques démographiques, économiques et géographiques des territoires occupés et en faisant venir des millions de colons de toutes parts du globe pour la conversion des territoires occupés en terre juive et en préparation à l’occupation de nouveaux territoires aux dépens des Arabes.
À la suite d’un débat tenu au sein du Comité exécutif de l’Agence juive trois jours avant l’annonce de la création d’Israël, Ben Gourion a déclaré :
« Prenez, par exemple, la Déclaration d’indépendance américaine. Ils n’ont pas mentionné de frontières spécifiques, et nous ne sommes pas obligés de mentionner de frontières pour la zone d’Israël. »
Cela montre les intentions d’Israël ; ce sont ses objectifs.
La position de la République arabe syrienne concernant le problème de la Palestine et l’agression impérialiste sioniste contre nos territoires est une position ferme basée sur des principes, conforme à la Charte de cette Organisation et à toutes les lois internationales ainsi qu’aux règles de justice et de droit. Il existe deux conditions fondamentales pour l’établissement de la paix au Moyen-Orient : premièrement, la reconnaissance des droits du peuple palestinien sur ses terres et sa patrie, ainsi que son droit inaliénable à l’autodétermination ; et deuxièmement, le retrait immédiat, complet et inconditionnel des forces israéliennes de tous les territoires arabes occupés.
Notre détermination à lutter pour la libération de tous les territoires arabes occupés et la restauration de tous les droits nationaux du peuple arabe palestinien n’a jamais été aussi forte qu’aujourd’hui. Nous sommes convaincus que la libération de la terre arabe de l’agression impérialiste sioniste fait partie de la lutte universelle pour créer un monde fondé sur l’égalité, la justice et la liberté, et que la réalisation de notre objectif de libération renforce les objectifs de l’ONU et ses nobles desseins.