Khaddam : La réforme n’est pas possible sous Bashar al-Assad.

publisher: مجلة التلفزيون المصرية The Egyptian Television Magazine

AUTHOR: هدرا جرجس

Publishing date: 2010-05-06

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Khaddam : La réponse de Bashar al-Assad aux projets de réforme était qu’il nécessitait une conférence nationale pour le parti, et les circonstances n’étaient pas propices à ce moment-là. Il a alors compris que la réforme n’était pas réalisable.

Q1 : Quelle est la chose la plus importante qui sera abordée dans vos mémoires à venir… ?

R1 : Mes mémoires ne se limitent pas à la présentation de faits isolés pendant la période où j’étais responsable de la politique étrangère, qui s’est étendue de novembre 1970 à la période qui a pris fin après ma démission de mes postes de direction au sein du parti et de l’État le 5 juin 2005. Ces mémoires contiennent l’histoire de cette période avec tous les événements, les réunions et les contacts, divisés en thèmes suivants :

A – Conflit avec Israël

B – Le Liban et ses événements

C – Relations syro-égyptiennes

D – Relations syro-irakiennes

E – Relations syro-iraniennes

F – Relations syro-soviétiques

G – Relations syro-américaines

Q2 : Quel impact attendez-vous après leur publication… ?

R2 : J’ai cherché à obtenir précision et crédibilité en écrivant ces mémoires, en dépeignant les événements et les faits tels qu’ils se sont produits. Je crois que le lecteur verra des faits et des événements reflétant la vérité, plutôt que ce qui était souvent lu.

Q3 : Vous avez passé 37 jours en tant que Président par intérim de la Syrie, une période de grande sensibilité dans l’histoire récente de la Syrie. Pouvez-vous nous dire ce qui s’est passé pendant cette période… ?

R3 : Pendant ces jours-là, après le décès du Président Hafez al-Assad et que son fils a pris les rênes du pouvoir, les Syriens étaient dans un état d’anticipation et se demandaient ce que le nouveau président allait faire. Allait-il poursuivre le chemin de son père ou apporter des changements politiques et économiques dans le pays ? Certains étaient très optimistes, tandis que d’autres étaient pessimistes.

Q4 : Vous avez mentionné que la Syrie était impliquée dans l’assassinat de Hariri. Quelles sont les preuves à cet égard… ?

R4 : Après la création du Tribunal spécial pour le Liban et la nomination de l’enquêteur international, l’affaire est tombée sous la juridiction de la justice internationale. L’enquêteur international a fait des progrès significatifs, et discuter des détails de l’affaire après la création du tribunal international pourrait ne pas être utile.

Q5 : Comment se passe votre vie en France maintenant, surtout après avoir été condamné à 13 peines d’emprisonnement à vie par la Cour criminelle militaire… ?

R5 : Je vis en France comme n’importe quel homme politique résidant en dehors de son pays. Les sentences prononcées par la Cour criminelle militaire n’ont aucune valeur.

Q6 : Croyez-vous que le Général Ghazi Kanaan, qui s’occupait des relations syro-libanaises, a été assassiné ou s’est suicidé… ?

R6 : Je n’ai aucune information sur la mort du Général Ghazi Kanaan. Il était proche du Dr. Bashar al-Assad et a été nommé Ministre de l’Intérieur, mais au cours des derniers mois, il est devenu très impopulaire. Beaucoup ont interprété sa mort comme un assassinat, mais la vérité ne peut être déterminée que par une autopsie.

Q7 : On dit que vous aviez une relation étroite avec Rafik Hariri, impliquant des partenariats commerciaux et un lien familial. Quelle est la nature de votre relation avec Hariri… ?

R7 : J’ai rencontré Rafik Hariri en 1981, et nous avons discuté de la situation au Liban. Il s’intéressait à ce qui se passait au Liban et a visité la Syrie pour rencontrer des leaders libanais. Notre amitié s’est développée, et il a offert ses services à la Syrie dans divers domaines. Il n’y avait aucune relation économique ni lien familial entre nous.

Q8 : Quelle était votre position lorsque vous étiez en Syrie et que vous occupiez différents postes concernant l’amendement de l’article 83 de la constitution… ?

R8 : Lorsque le Président Hafez al-Assad est décédé, j’étais en dehors de Damas en vacances dans ma ville côtière. Il y avait une réunion prévue entre moi et le Président Hafez pour le samedi. J’ai quitté ma ville pour me rendre à Damas, et à mon arrivée chez moi à Damas, on m’a informé que le palais avait demandé ma présence depuis plusieurs heures. Quand j’ai appelé le palais, on m’a dit qu’ils m’attendaient chez le président. C’est alors que j’ai réalisé que le président Hafez était décédé, car j’étais au courant de la détérioration de sa santé. Je suis allé chez lui et j’ai vu les voitures de la direction qatarie devant. En entrant dans la maison, j’ai trouvé tous les membres de la direction qatarie, y compris le Dr Bashar al-Assad. Le Secrétaire adjoint qatari (Suleiman Qadah) m’a informé que la direction qatarie avait décidé de nommer le Dr Bashar al-Assad à la présidence et de modifier l’article 83 de la constitution. Le Président du Conseil du Peuple avait convoqué une session urgente pour approuver l’amendement constitutionnel. Il était naturel pour moi de ne pas m’y opposer, car le Président Hafez al-Assad avait planifié le transfert du pouvoir à son fils pendant des années, en particulier au sein de l’armée, des agences de sécurité et du parti.

Q9 : Le journal français « Libération » a déclaré qu’il existe une pensée américaine visant à changer le système gouvernemental en Syrie avec vous à sa tête. Quel est votre commentaire… ?

R9 : L’opposition syrienne convient que tout changement en Syrie devrait être un changement national, et non par intervention extérieure, car cela pose des dangers significatifs pour l’avenir du pays.

Q10 : Quelle est la composition idéologique des membres du Front de Salut National que vous avez établi pour renverser le régime syrien… ?

R10 : La composition idéologique des membres du Front de Salut National en Syrie comprenait des représentants de diverses idéologies présentes en Syrie. Cependant, le retrait des Frères musulmans a laissé aucune représentation pour le courant islamique.

Q11 : Est-il vrai que vous avez fait partie de ceux qui ont aidé à faciliter la présidence de Bashar al-Assad en Syrie… ?

R11 : Comme je l’ai mentionné précédemment, le Président Hafez al-Assad a orchestré la transition du pouvoir à son fils, Bashar al-Assad, des années avant sa mort. Bashar exerçait déjà le pouvoir décisionnaire même avant d’occuper un poste politique officiel. Il était impliqué dans la formation du gouvernement et la configuration de l’armée. Cela est devenu courant, et il donnait des orientations au Premier ministre et aux ministres.

Q12 : Quelles étaient les vraies raisons derrière votre rébellion contre lui… ?

R12 : Au début de sa présidence, j’ai essayé de l’aider à mettre en œuvre des changements politiques et économiques. Cette tentative a commencé après l’effondrement de l’Union soviétique et des systèmes qui y étaient alignés, et après que les États-Unis ont pris un rôle de premier plan à l’échelle mondiale et ont promu la mondialisation. À mon avis, il était nécessaire de développer les systèmes politiques et économiques, de s’ouvrir aux citoyens et de promulguer des lois pour les partis et les médias. J’ai présenté ces idées lors de conférences, de réunions de parti et d’interviews médiatiques. J’ai proposé des réformes politiques le 22 juillet 2000 et des réformes économiques globales le 8 septembre 2000. Il croyait que la réforme économique devait précéder la réforme politique. La direction qatarie a approuvé le projet de réforme économique, et après un an, ils ont dit que le projet était entre les mains du Président. La réponse de Bashar lors d’une réunion de direction était que la réforme économique ne pouvait pas être réalisée sans réforme administrative. J’ai proposé un projet de réforme administrative et j’ai essayé d’amener des experts français. Quelques mois plus tard, la direction du parti a décidé d’un projet de réforme du parti. La réponse de Bashar était qu’il nécessitait une conférence nationale pour le parti, mais les circonstances n’étaient pas propices. C’est là que j’ai réalisé que la réforme n’était pas possible. Sa politique au Liban, remplaçant l’interaction politique par des mesures de sécurité, a nui aux intérêts syriens et libanais. Il convient de noter que pendant le temps de son père, un comité politique s’occupait des affaires libanaises, remplacé d’abord par le Général Ghazi Kanaan puis par le Colonel Rustum Ghazali. Sa décision de prolonger le mandat du Président Emile Lahoud, malgré mon accord pour ne pas prolonger, a conduit à la Résolution 1559 du Conseil de sécurité des Nations unies, créant plus de difficultés pour la Syrie. J’ai décidé de démissionner de mes postes au sein du parti et de l’État lors de la première conférence du parti. J’ai présenté mes perspectives sur diverses questions nationales et internationales pendant la conférence. Après cela, j’ai quitté le pays pour me reposer, et après une profonde réflexion, j’ai décidé de m’opposer au régime.

Q13 : Monsieur Abdul Halim Khaddam, où en sont les relations syro-iraniennes, surtout alors que vous êtes en train de publier un livre qui traite de l’histoire de leur alliance étroite ?

R13 : Les relations entre les régimes syrien et iranien ont pris leur trajectoire actuelle. Ces relations sont importantes et entrelacées, et il est erroné de penser que ces liens peuvent être séparés.

Q14 : Que voyez-vous dans la réunion tripartite qui a réuni les présidents Bashar al-Assad et Ahmadinejad, ainsi que le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah ?

R14 : La réunion tripartite est un événement naturel entre ces trois parties pour passer en revue les situations régionales et internationales ainsi que les possibilités anticipées et comment y faire face. Le Président iranien représente l’Iran, le Président syrien représente la Syrie, et le Cheikh Hassan Nasrallah représente le Liban. En d’autres termes, la réunion était iranienne, syrienne et libanaise. Cette alliance a été mentionnée par le Président iranien.

Q15 : Quelles sont les différences entre le père Assad et le fils Assad en ce qui concerne leur relation avec l’Iran ?

R15 : Il y a plusieurs différences clés :

A – L’alliance était principalement dirigée contre le régime de Saddam Hussein en raison de la rivalité intense entre les régimes syrien et irakien.

B – Le Président Hafez al-Assad a informé les Iraniens que la Syrie soutiendrait tout autre pays arabe avec lequel l’Iran entrerait en conflit. La Syrie a rapidement agi pour contenir les tensions entre l’Iran et l’Arabie saoudite et le Koweït. La Syrie a assuré ses pays arabes partenaires qu’elle les soutiendrait en cas d’actions militaires iraniennes.

C – Les Iraniens n’ont pas été autorisés à intervenir dans les affaires internes de la Syrie. Une mission iranienne de leaders religieux tentant de promouvoir l’islam chiite a été empêchée et expulsée.

D – Malgré nos différences avec les États-Unis et leur hostilité envers l’Iran, le dialogue avec les Américains est resté ouvert. Cela a conduit à la participation de la Syrie à la Conférence de Madrid et à des négociations directes avec Israël, malgré la position anti-israélienne ferme de l’Iran.

La situation a différé pendant le règne du fils. Les relations avec le régime irakien se sont améliorées, et l’influence iranienne est devenue significative en Syrie et sur des questions fondamentales. Des missions évangéliques se sont répandues dans plusieurs provinces syriennes.

Q16 : Comment évaluez-vous les récentes menaces israéliennes contre le Liban et la Syrie, suite aux rumeurs concernant la fourniture de missiles Scud à Hezbollah ?

R16 : Les menaces israéliennes ne sont pas sérieuses car les exécuter entraînerait une guerre avec la Syrie et le Liban. Cela contredit la stratégie américaine qui donne la priorité au dossier iranien et au règlement palestinien.

Q17 : Monsieur Khaddam, en raison de votre précédente position en Syrie, vous aviez de bonnes relations avec l’Arabie saoudite. Que reste-t-il de ces relations compte tenu du rapprochement actuel entre la Syrie et l’Arabie saoudite ? Ce rapprochement n’a-t-il pas affecté négativement les performances de l’opposition syrienne ?

R17 : L’Arabie saoudite est un État central dans la région avec sa propre stratégie et ses intérêts. Le Front pour le Salut National en Syrie est un mouvement d’opposition nationale qui œuvre pour un changement pacifique sans intervention extérieure. Le régime syrien a bénéficié de l’ouverture internationale et arabe et a concentré ses efforts sur plus d’oppression et de pression sur le peuple syrien.

Q18 : Le Liban était-il la principale raison derrière le récent rapprochement entre la Syrie et l’Arabie saoudite, ou existe-t-il d’autres questions au-delà du dossier libanais ? Quelles sont les perspectives de ce rapprochement à l’avenir prévisible ?

R18 : Je n’ai pas d’informations précises, mais la situation régionale a probablement joué un rôle.

Q19 : Comment évaluez-vous les relations syro-égyptiennes à long terme ?

R19 : Les relations syro-égyptiennes font partie de l’histoire des deux peuples qui ont défendu le destin arabe à différentes étapes de l’histoire. Bien que des différences puissent surgir entre les gouvernements, la sympathie entre les deux peuples a toujours été plus profonde que les disputes. L’Égypte, pour le peuple syrien, est le grand frère et joue un rôle central dans le destin arabe.

Q20 : Il y a un an, vous aviez une apparition régulière sur la chaîne Zenobia. Quelle est votre connexion à la chaîne, et quelles étaient les raisons de son interruption ?

R20 : La chaîne Zenobia était la voix de l’opposition syrienne. Elle a été interrompue en raison de brouillages. L’Union internationale des télécommunications, un organe des Nations Unies, nous a informés que les brouillages venaient d’une caserne militaire dans un pays frère, la Libye.

 

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