Présent : le président Hafez Assad
Ministre des Affaires étrangères Abdel Halim Khaddam
Le secrétaire général
Roberto E. Guyer
Le président Assad a commencé la réunion en exprimant sa satisfaction de la visite du Secrétaire général. Il a déclaré que 1974 serait une année très importante pour les Nations Unies, surtout compte tenu des problèmes discutés à l’Assemblée générale. Il a spécifiquement mentionné la question de la Palestine. Il a ensuite fait référence aux réactions israéliennes, affirmant qu’elles ne comprenaient pas l’importance historique de la décision de l’Assemblée générale et que les temps ont changé.
Le Secrétaire général a répondu qu’il pensait qu’avec le temps, Israël comprendrait qu’elle devait négocier avec Arafat. Il a ensuite loué l’attitude syrienne lors de la crise de la semaine précédente. « Le calme avec lequel le gouvernement syrien a réagi pendant ce week-end et sa décision de ne pas entamer une mobilisation ont grandement contribué au maintien de la paix. Néanmoins, même si cette crise avait été évitée, la situation restait précaire et il était impératif d’arriver à une paix juste et durable dans la région.
Le président Assad a répondu qu’il avait été en contact avec le Dr Kissinger et l’URSS. La Syrie n’a aucune intention d’attaquer Israël, mais si elle était attaquée, elle riposterait immédiatement.
Malgré la puissance actuelle d’Israël, elle serait finalement vaincue. Il était donc nécessaire d’arriver le plus tôt possible à une paix juste. La paix ne peut être réalisée sans les Nations Unies, et son rôle important doit être reconnu ; il l’avait dit à la fois aux États-Unis et à l’URSS. La situation actuelle ne pouvait pas durer longtemps, et donc tous les efforts devraient être faits en faveur de la paix.
Le Secrétaire général a déclaré que c’était là la question fondamentale pour laquelle la FINUL devrait être prolongée. En agissant ainsi, du temps serait gagné pour parvenir à un règlement de paix. Comme il l’avait déjà affirmé à plusieurs reprises, le maintien de la paix en soi n’est pas une fin en soi, mais permet d’obtenir un certain temps pour parvenir à un traité de paix. Cependant, le maintien de la paix dans le cadre de ses pratiques actuelles ne pourrait pas être maintenu sans le consentement des parties intéressées. Pour cette raison, il avait jugé nécessaire de contacter le Président.
Le président Assad a déclaré qu’à l’origine, ils avaient l’intention de ne pas accepter le renouvellement de la FINUL car aucun progrès n’avait été réalisé dans les négociations de paix.
Suite à la réception des deux messages du Secrétaire général et à l’annonce de ses intentions de visiter Damas, ainsi qu’aux demandes formulées par les États-Unis, l’URSS et des gouvernements arabes amis, il avait décidé de changer d’attitude et d’accepter le renouvellement de la FINUL. Néanmoins, il tenait à préciser clairement que durant cette période à venir, des efforts doivent être déployés pour parvenir à une paix juste. Le Secrétaire général a déclaré qu’il était très reconnaissant de cette décision car elle permettait du temps pour les négociations. Il a ensuite demandé si le président entendait par là que la Conférence de Genève devait être convoquée immédiatement. Le président a répondu que ce n’était pas le cas et qu’il était prêt à laisser à Dr. Kissinger le temps de poursuivre sa diplomatie bilatérale. Si cette voie n’aboutissait pas à des résultats complets, alors viendrait le moment de reprendre la Conférence de Genève. Il a laissé entendre que le temps qu’il accordait aux efforts de Dr. Kissinger s’étendait jusqu’à la mi-janvier 1975, bien qu’aucun calendrier précis n’ait été mentionné. Le président a réaffirmé que si les efforts de paix bilatéraux ne réussissaient pas, Genève devrait être reconvoquée, même en dépit des objections américaines ou israéliennes.
Le Secrétaire général a convenu de la nécessité de donner un certain temps aux négociations bilatérales et a affirmé que les approches bilatérales et multilatérales n’étaient pas de nature conflictuelle. Il ne faut pas oublier que les Nations Unies ne disposaient pas de force à leur disposition mais seulement d’un pouvoir mobile. Il était donc nécessaire de combiner les efforts des grandes puissances avec ceux de la communauté internationale. Le Président a répondu qu’il n’était pas d’accord avec cette interprétation et que le Secrétaire général disposait également de pouvoir matériel. S’il critiquait un État donné pour ne pas avoir rempli ses obligations en vertu de la Charte, cela avait de fortes répercussions politiques et affectait le pays en question. Il a souligné à plusieurs reprises l’importance du rôle des Nations Unies et a déclaré qu’aucune solution définitive ne pouvait être trouvée en dehors de celles-ci. Il a ajouté qu’il avait transmis cette opinion aux États-Unis et à l’URSS, et c’est dans cette optique qu’il était reconnaissant de la visite du Secrétaire général à ce moment-là, car cela lui donnait l’occasion de discuter des problèmes actuels avec lui.
Le Secrétaire général a ensuite demandé s’il serait acceptable pour la Syrie de prolonger le mandat de la FINUL pour une période supplémentaire de six mois, à quoi le Président a répondu affirmativement. Le Président a ensuite fait référence à la résolution qui devait être présentée au Conseil de sécurité concernant le renouvellement du mandat de la FINUL et a déclaré qu’il approuvait celle-ci. Le Secrétaire général a mentionné qu’il s’attendait à ce que la résolution soit présentée par un pays neutre non aligné. Le Président a répondu qu’il était d’accord avec cela et a suggéré que le plus grand nombre possible de soutiens soit obtenus à cet effet. À la fin de la réunion, le Président a remercié à nouveau le Secrétaire général pour sa visite en Syrie et a réaffirmé son désir de coopérer avec les Nations Unies sur tous les aspects du problème du Moyen-Orient.